Solidarité

On se demande parfois comment cela pouvait bien se passer pour les pauvres et les malheureux avant l’invention de la sécurité sociale, surtout sur une île comme la nôtre, où l’immense majorité des habitants devaient leur survie à un âpre combat de tous les jours.

Il y avait bien la « Caisse des pauvres », mais il était difficile de savoir à qui on devait donner en priorité, et encore, un tout petit peu seulement, lorsqu’il aurait parfois fallu pouvoir donner à tous, ou presque, et qu’il n’y avait en fait, pas grand-chose à donner. Les cas de familles sans ressources et malades sont nombreux, et on en entend parler de manière récurrente au fil des documents de la Cour de Justice. Le nombre de personnes à aider s’amplifie encore après l’abolition de l’esclavage. En effet, nombre des anciens esclaves se retrouvent sans rien, du jour au lendemain, sans logement, sans ressources, abandonnés par leurs anciens propriétaires comme on l’a déjà vu. Le gouvernement Suédois avait bien prévu un fond pour les émancipés, comme on les appelle alors, mais qu’en est-il, par exemple, vingt-ans plus tard ?

En 1867, tout n’est pas réglé, et certains anciens esclaves vivent encore dans le plus grand dénuement et il faut les aider comme on le voit ici.

Le 13 juin 1867 un courrier est envoyé à l’Honorable Conseil du Gouvernement de l’île de Saint-Barthélemy.

« Nous, soussignés Capitaine et représentants de la partie Sous le Vent en cette dite île, avons l’honneur de vous adresser très humblement la présente pétition, disant, Messieurs, que conformément à l’ordre qui nous a été signifié par le Capitaine DUCHATELLARD pour statuer une réunion entre les membres de la Chambre des représentants du dit arrondissement à l’effet de se concerter ensemble sur la position malheureuse du nommé Jean Charles, afin de soulager ses maux, et lui procurer un domicile, un soutien et soins nécessaires à son existence, et obéir aux lois et ordonnances Suédoises comme à celles de l’humanisme.

Nous avons à l’unanimité trouvé nécessaire de taxer les habitants du dit arrondissement, chacun selon ses moyens et positions, de payer entre eux, trois gourdes par mois au sieur Joseph LAPLACE qui accepte cette charge, et de plus, nous avons statué que son fils, Mr Jean Baptiste LAPLACE, lui porterait des soins ».

Le courrier est signé de Mr DUCHATELLARD qui semble également l’avoir écrit, et il est cosigné par Pierre LÉDÉE, Pierre MAGRAS, Joseph BLANCHARD. Il y a aussi les marques ordinaires de François Salomon TURBÉ, Antoine GRÉAUX et de Joseph LAPLACE.

Qui est Jean Charles ?

Il est forcément un ancien esclave, ou un descendant d’esclaves, mais lequel ? Il pourrait être Jean Charles, le fils de Popotte, baptisé le 24 octobre 1824 et déjà âgé de 18 mois. Il serait né libre alors, car il n’y a pas mention de propriétaires sur l’acte. Le parrain est Jean Pierre, et la marraine, Marie Antoinette. Pas de patronymes, nous sommes bien en présence de gens de couleur libre de la campagne. Je n’ai pas d’autres détails concernant Jean Charles, en tous cas, je ne parviens pas à faire de connexion. Pourrait-il être notre Jean Charles MARCIAL ? Pas convaincu, certains détails ne vont pas dans ce sens.

En tous cas, ce Jean Charles va pouvoir bénéficier d’une aide exceptionnelle, financée par la solidarité des habitants du quartier, même si elle est imposée par le Gouvernement. On peut noter tout de même que chacun devra payer en fonction de ses moyens.



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