En mémoire d’un bienfaiteur de St Barth

Article publié pour « Le Domaine Félicité »

Le Père Irénée de Bruyn

Les nombreux St Barth et les visiteurs qui grimpent la colline de Gustavia vers le sud découvrent une plaque apposée à l’angle de l’édifice de l’hôpital qui porte le nom de son fondateur « Père Irénée de Bruyn ».

L’évocation de ce nom vient rappeler la grande figure de ce prêtre de l’ordre de St Dominique qui a tant œuvré pour le bien-être de la population de St Barth. Les difficultés ne lui ont pourtant pas été épargnées.  Il a été de tous les combats aux côtés de gens simples et rudes qu’il aimait sincèrement et pour lesquels il a œuvré uniquement dans le but de servir. Il a mis toute l’énergie de sa foi et de son courage à mettre en place des structures indispensables pour la santé et l’éducation (chapelle, école, citerne, hôpital).

Cette  exposition voudrait lui rendre humblement l’hommage qu’il mérite.

La  présence des pères dominicains sur l’île de St Barth.

On pourrait dire d’emblée que ce fut le fait de circonstances particulières. En effet, pendant une longue période, l’administration des paroisses de l’île était assurée par des prêtres de passage. Ils desservaient aussi les îles voisines. Il n’y avait pas de prêtres résidents. L’éducation religieuse des enfants était confiée aux familles et à quelques bénévoles qui  leur enseignaient les rudiments de la foi. Lorsque la séparation de l’Eglise et de l’Etat fut appliquée en Guadeloupe en 1911, le recrutement du clergé devint de plus en plus difficile. Les deux paroisses de l’île ainsi que celles de St Martin furent confiées aux pères dominicains du Diocèse de Curaçao ; c’est ainsi que, en Novembre 1918, un jeune prêtre, le Père Irénée de Bruyn débarquait à ST Barth. La présence des pères  dominicains dura sans interruption une quarantaine d’années. Les spiritains du diocèse de Guadeloupe prirent ensuite le relais en 1950.

Le P.de Bruyn, prêtre bâtisseur, totalement dévoué à ses paroissiens.

Lorsque le P. de Bruyn arrive sur l’île, il ne tarde pas à se rendre compte du grand dénuement de la population tant sur le plan religieux que sur le plan de l’éducation de l’ensemble de la population. Très tôt, il se met à aimer ce peuple courageux mais qui manque cruellement de moyens. Sous le chaud soleil, il parcourt les sentiers rocailleux en encourageant et en redonnant confiance. Au long de ses rencontres dans les quartiers, il découvre les véritables besoins. Il ne se contente pas de bonnes paroles appréciées par les gens. Il mesure au fur et à mesure l’immensité du chantier à réaliser avec le concours de bonnes volontés qui ne tardèrent pas à se manifester. Elles voyaient en lui le guide sûr et efficace pour de grandes œuvres à accomplir ensemble. C’est ainsi que, dans un temps record, il s’attaque à trois grands chantiers prioritaires : une chapelle, son clocher, deux écoles, une citerne et dès que possible la construction d’un hôpital.

Le chantier est ouvert. Tout le monde est à l’œuvre.

Tout est à faire. Mais les bonnes volontés ne manquent pas. Il faut d’abord un terrain. Un généreux donateur répond à l’appel : Mr Fréderic Blanchard. Il faut des matériaux. Les générations d’aujourd’hui ne réalisent peut-être pas la pénibilité du travail réalisé. Les matériaux de construction n’étaient pas à portée de main  dans les quincailleries comme de nos jours. Un témoin raconte : « on transportait des cayes à chaux sur la plage. On faisait des tas. On les brûlait en y ajoutant des mancenilliers, après la cuisson, on arrosait les cayes avec de l’eau et elles se réduisaient en poudre blanche dont les maçons se servaient comme mortier. Ensuite tout cela devait être transporté sur la tête.  Un long cortège de femmes et d’hommes serpentait les sentiers rocailleux sous l’ardeur d’un soleil généreux. Mais notre curé n’était pas  un spectateur. Pendant  la fabrication de la chaux, il a travaillé lui-même comme un vrai ouvrier, il n’avait peur de rien.  Il était partout, transportant des pierres, maniant le niveau et l’équerre comme un professionnel. »

St Barth s’ouvre sur l’avenir…

En Août 1921 la première pierre de la Chapelle fut posée en présence de Mgr Genoud évêque du diocèse de Guadeloupe. La première messe fut célébrée, 4 mois plus tard, le jour de Noel 1921 avec grande solennité.

L’école Sancta Maria ouvrira ses portes en 1926. Elle deviendra bien vite trop petite. Elle sera agrandie en 1930-31. Le P. de Bruyn trouvera en Mlle Malespine, l’âme sœur dévouée, qui en dépit de nombreuses difficultés va assurer l’enseignement.

L’eau potable a toujours été le problème crucial de l’île. Les « gers » des cases et les rares citernes de cette époque étaient loin de satisfaire les besoins. L’eau saumâtre des puits était une solution d’appoint pour le ménage et les animaux. Mais il fallait aller la chercher dans les fonds.

La construction d’une grande citerne s’imposait. Mais de loin la structure imposante prenait l’allure d’un véritable fortin. Ce qui valut à notre dévoué pasteur des dénonciations calomnieuses et xénophobes aux autorités de la Guadeloupe prétextant que ce curé hollandais était en train de construire pour y placer des canons allemands. L’anecdote méritait d’être citée car elle est révélatrice du climat politique de l’époque en Guadeloupe.

L’école de Lorient commencée par le Père Exler en 1923 sera terminée par Père de Bruyn. Elle ouvrira ses portes le 1er mars 1930.

La construction de l’hôpital

L’œuvre du P. de Bruyn était loin d’être achevée. Soucieux de la santé des St Barth, il décide de construire un hôpital. Il n’était pas facile d’accéder aux soins les plus élémentaires. Grâce à la bonne volonté de nombreuses personnes de l’île, il peut se procurer les matériaux nécessaires pour la construction. Le terrain d’assise fut offert par deux généreuses donatrices. D’autres donnèrent les fondations des maisons brûlées qui ravagea Gustavia en 1852. Avec une grande rapidité, les fondations sortirent de terre pour recevoir la charpente de la structure. Les stocks de bois provenaient de l’ile voisine de St Kitts. Un ingénieur de Guadeloupe de passage dans l’île adressa des compliments appuyés au P. de Bruyn et ses collaborateurs pour ce merveilleux hôpital. En 1933, le P. de Bruyn fit appel aux religieuses de ST Paul de Chartres bien connues dans le domaine hospitalier. L’inauguration officielle eut lieu le 18 Février 1934.

Tout a une fin….

Ce fut avec une grande tristesse que la population apprit le départ de son pasteur d’immense talent, celui qui restera un bienfaiteur de ST Barth.  En effet, le 1er Mars 1934, le P. de Bruyn quittait St Barthélémy.

Puissent tous ceux qui franchiront les portes de cette humble demeure où Mlle Malespine (celle qui restera pour beaucoup de ses proches : tout simplement « marraine » a vécu les dernières années de sa vie) et en mémoire du grand bienfaiteur de l île, le Père Irénée de Bruyn, prendre un temps de silence plein de respect pour mesurer à leur juste valeur, l’héritage humain et spirituel que nous ont laissé ces deux grands témoins.



Catégories :Uncategorized

1 réponse

  1. The OPs were energetic religious wherever they served in the Caribbean. Many also served as diocesan administrators and bishops. Thanks for a peek at a time St.Barth really needed this kind of socially-focused energy.

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