John MARTINS de CLARENCIEUX est décédé le 28 aout 1813 et il est enterré sur notre ile, au cimetière de Lorient
Sa tombe nous apprend qu’il est né sur l’ile Portugaise de Madère vers 1748.
Sur le registre de l’église Lutherienne de Gustavia il est indiqué qu’il est né le 24 juin 1749

Il devait être commerçant, peut-être aussi navigateur, et ses premiers pas aux Antilles semblent passer par l’ile Hollandaise de Saint-Eustache, au moins au début des années 1790, peut-être même plus tôt.
En effet, dans le journal local « St Eustatius Gazette », on retrouve traces de lui en 3 occasions :
Dans une édition de juin 1792, il fait paraitre une annonce avec une liste de produits à la vente dans sa boutique. Malheureusement, la copie n’est pas d’une définition suffisante pour en tirer quelque chose.

Dans l’édition du 17 aout 1792, tout en bas à gauche de la première page, John MARTINS de CLARENCIEUX loue le local situé au-dessus de son magasin. On pourrait donc penser qu’il est propriétaire du bâtiment. A cette époque la pression immobilière est très forte à Saint-Eustache, et les prix s’envolent et les logements devenant difficiles à trouver, on loue l’étage des entrepôts.

Puis, une troisième fois dans une annonce parue en novembre 1792 dans la même gazette, il propose à la vente du vieux brandy au gallon ou en futs, du vin rouge (Bordeaux?) de première qualité en futs, du vin de Margaux et du Médoc à la caisse, du vin rouge (Bordeaux?) premier prix, de l’huile (d’olives?), du thé à 1 dollar et 1 quarter la livre, du sucre raffiné, du cordage à 7 stiver (petite pièce Hollandaise de faible valeur) la livre, de la peinture et de l’huile, de l’huile pour lampes et assortiment d’équipement pour les navires.

Un petit mot sur Saint-Eustache à cette époque pour mieux comprendre ces années là,
John a donc un magasin (entrepôt ?) à St-Eustache et comme les autres nombreux commerçants, Il doit importer d’Europe et revendre sur place, sans doutes aussi pour la re-exportation vers les colonies Françaises, Anglaises ou Américaines qui viennent s’approvisionner ici. Peut-être aussi achète-t-il des marchandises qu’il renvoie en Europe ou vers d’autres iles (par exemple la morue salée, la farine ou le tabac, mais aussi du bétail, du riz, du goudron, de l’huile pour les lampes, etc… que les navires Américains amènent pour échanger contre les produits Européens, ou des denrées Antillaises comme le sucre ou le café). En effet, à cette époque l’activité bat son plein à Saint-Eustache. Les Hollandais ont établis un port franc par lequel une grande partie du commerce atlantique transite. Trafic légal ou illégal, contre-bande, blanchiment de piraterie, traite des esclaves, Saint-Eustache est sur tout les marchés et on y rencontre des gens venus de partout, des Anglais, des Américains, des Français, des Espagnols, des Allemands, des Danois… L’ile est cosmopolite., on y entend parler toutes les langues, on y voit des marchandises de partout. La guerre de 7 ans (1756-1763) a grandement participé au développement des affaires sur le « Golden Rock », mais c’est la guerre d’indépendance Américaine qui fait tout exploser. L’Amérique a besoin d’armes. de poudre, de balles, d’acier Allemand, de plomb, de tissus, et Saint-Eustache fournit. Saint-Eustache importe, et revend aux 13 colonies. D’environ 2000 navires de commerce par an au début des années 1770, il y en a près de 3500 en 1779. Le 16 novembre 1776, le gouverneur de l’ile, Johannes de GRAAFF, fait saluer par les canons du fort, le navire Andrea Doria battant pavillon Américain, et, car c’est la première fois qu’une nation étrangère salue le drapeau des Etats-Unis, l’événement entre dans l’Histoire et porte le nom de « the first salute ». Les Anglais sont agacés par la doctrine de neutralité des « Hollandais » qui justifient ainsi leur commerce avec l’Amérique ( Free ships, free goods). L’affaire du « first salute » n’arrange pas les choses. En décembre 1780, le Royaume Unis déclare la guerre à la République des 7 provinces des Pays-Bas. La guerre n’eu pas le temps de commencer, qu’elle finit presque aussitôt. Le 03 février 1781, l’amiral Anglais RODNEY prend l’ile et la pille (Sint-Maarten et Saba se rendent le lendemain). Pour comprendre l’importance commerciale de Saint-Eustache à cette époque, on peut retenir les propres mots de RODNEY écrivant à son épouse » les richesses de Saint-Eustache sont au-delà de ce que l’on peut imaginer. Il y avait 130 navires (de commerce) au mouillage ». Après avoir rattrapé un convoi d’une trentaine de navires Hollandais qui avaient quitté l’ile la veille de la prise, les Anglais estiment le montant total du butin du pillage des bateaux et des dépôts de commerce à près de 3 millions de Livre Sterling (de l’époque). Ce à quoi il faut rajouter de l’or et de l’argent pour près de 4 millions confisqué aux habitants. Dans les jours qui suivent la prise de Statia, RODNEY laisse flotter le drapeau Hollandais sur le fort, et piège ainsi une cinquantaine de navires Américains. L’ile est durement touchée, mais, en novembre 1781, les Français prennent l’ile aux Anglais et la gardent jusqu’en 1784 avant de la redonner aux Hollandais. Le commerce se remet en route, et, aux début des années 1790, tourne de plus belle. En 1792, des observateurs écrivent que la partie basse de Oranje Stad comptait 600 dépôts repartis des deux cotes de la route qui court le long de la plage sur presque 2 kilomètres. Les dépôts étaient tellement plein qu’il y avait même des marchandises sur la plage. Jusqu’en 1795 l’ile continue de prospérer. En 1795, la France prend le contrôle des Pays-Bas, et Saint-Eustache redevient Française pour un temps. L’ile perd son statut de port franc, et les commerçants et le commerce filent à Saint-Thomas et Saint-Barthelemy.
C’est surement à cette occasion que John quitte Saint-Eustache et vient s’installer sur notre ile. Nous n’avons pas la date exacte, mais au plus tôt, après la naissance de son fils Jacob au début de 1794 à Saint-Eustache. Un fils ? Oui, en effet, John MARTINS de CLARENCIEUX s’est entre temps marié avec Sarah Cuvilje SIMMONS. Le mariage a lieu à Saint-Eustache le 31 mars 1793, et il est bien dit natif de Madère, mais aussi veuf d’une Laetitia BROUWER/BROUWEN. Sarah est native de l’ile.

Selon son acte de baptême du 27 mars 1768, Sarah Cuvilje SIMMONS est née le 20 mars de la même année, fille de Jacob SIMMONS et de Martha CUVILJE.

Pendant ce temps là, les Suédois ont pris possession de Saint-Barthelemy. Gustavia est construite, le port franc instauré, et les affaires démarrent en copiant plus ou moins sur les modèles de Saint-Eustache et de Saint-Thomas (sous couvert de neutralité, on importe de partout et on revend à tous). En 1789 la révolution en France entraine des perturbation dans les colonies Française. Puis en 1791 débute le soulèvement de Saint-Domingue, entrainant l’arrivée de réfugiés Français dans l’ile. En 1793, en guerre avec l’Angleterre, la France perd la Martinique, Sainte-Lucie et la Guadeloupe. Des réfugiés, aussi bien royalistes que révolutionnaires viennent se réfugier ici aussi. L’ile voit arriver jusqu’à 100 réfugiés dans une même journée ! Le commerce s’intensifie avec le gouvernement révolutionnaire de Victor HUGUES qui a même un « consul » ou « chargé d’affaires » sur place (Honoré BIGARD) qui revend les produits de Guadeloupe et l’approvisionne avec les marchandises qui lui font défaut.
Ce sont, à priori, certain de ces réfugiés qui apportent la Rose-Croix puis la Franc-maçonnerie à Saint-Barthelemy. Dans les années précédent 1797 est créé un chapitre de la « Rose Croix« . On y retrouve notre John MARTINS de CLARENCIEUX.
D’ailleurs, sur la proclamation ci-dessous (réclamant la séquestration des émigrés et lâches qui ont fuit à Saint-Barthelemy, ce « repaire des rebelles et des émigrés » ) on retrouve les noms de plusieurs d’entre eux.

Courant 1797, la Grande Loge Franc-maçonne de Suède décrète la création d’une loge à Saint-Barthelemy « la Sudermanie 35 » dans laquelle on retrouve en temps que membre fondateurs, une partie des membres de la « Rose Croix« . En avril 1798, la nouvelle loge de Saint-Barthelemy élit ses officiers, et, le 24 juin, John MARTINS de CLARENCIEUX en préside l’ouverture en temps que « Vénérable« . On peut penser que John est donc un Franc-Maçon depuis déjà quelques temps et qu’il a déjà un grade élevé dans la hiérarchie. Et, en effet, on le retrouve qui préside une assemblée en avril 1793 à Providence, Rhode-Island. Qu’y fait-il ? Il est alors dit « réfugié Français » habitant à Warwick, R.I. Je n’ai pour l’instant rien trouvé d’autre sur sa présence dans le Rhode Island à cette époque mais il doit bénéficier d’un certain prestige pour présider cette réunion.
A Saint-Barth, John est à nouveau proposé en tant que « Vénérable » en janvier 1803 (la loge est mise en suspend lors de la prise de l’ile par les Anglais en mars 1801 jusqu’à son retour à la Suède en Juillet 1802). Mais son grand-âge et sa maladie ne lui aurait pas permit de mener à bien sa mission et il est finalement nommé « Deputy Master » de la loge.
En octobre 1798 il est élu magistrat représentant la partie ouest de Gustavia au Conseil de Justice, puis, pendant l’occupation Anglaise, il est nommé Notaire Public. En 1804 il est nommé accusateur public pour Gustavia, et, en même temps, il fait fonction de traducteur et interprète Espagnol, Italien et Portugais. En avril 1806 il est nommé gardien des poids et mesures pour la douane. En octobre de la même année, il est nommé juge et contraint de démissionner de son poste aux douanes. Le 23 aout 1807, il est élu marguillier par les Catholiques de Gustavia (c’est sans doutes pour cette raison qu’il est enterré au cimetière de Lorient).
Mais retournons un peu en arrière.
Le 25 décembre 1790, dans le registre Luthérien de Saint-Eustache, on trouve la transcription du baptême Catholique d’un Joannes Baptistas MARTINUS ( Jean Baptiste MARTINS) fils légitime d’un Joannes MARTINUS et d’une Sarah SIMMONS, né le 16 aout 1789. Le certificat est signé par un prêtre Catholique (Joseph ALVAREZ) le 16 décembre 1789. C’est un élément très important. Cela signifie que les parents de l’enfant sont mariés par un prêtre Catholique avant le mois d’aout 1789 (puisque c’est un enfant légitime) et non pas seulement en 1793. Autre élément important, le nom du père, est MARTINS, pas MARTINS de CLARENCIEUX. On pourrait penser que c’est un oubli, soit, mais je pense que c’est plus compliqué.
En effet, j’ai beau chercher partout en ligne, je ne trouve rien de plus, non seulement sur lui, mais rien du tout sur un patronyme » de CLARENCIEUX« . Ce nom qui sonne pourtant très Français ne semble correspondre à rien d’autre qu’au titre Anglais de « Clarencieux King of arms » ( héraldique Anglaise). A part ça, rien. Et je suis maintenant convaincu que son véritable nom c’est John / Joao MARTINS (nom fort répandu d’ailleurs sur l’ile de Madère. Malheureusement les registres pour sa période de naissance ne sont pas disponibles, et on ne connait pas sa paroisse d’origine). Pour une raison que je ne peux pour l’instant pas expliquer, il rajoute « de CLARENCIEUX » à son nom, vraisemblablement après 1790. Est-ce lié à la Franc-Maçonnerie ? A la Rose Croix ? En tous cas, je suis sûr que c’est lui qu’on retrouve sur la liste des habitants dressée en février 1781 par RODNEY après la prise de Saint-Eustache et figurant sous le nom de John MARTIN. De même, je suis sûr que c’est lui que l’on retrouve sous ce nom en tant que membre d’une loge Maçonnique de cette ile, sur une liste datée du 26 juillet 1774, puis encore sur deux autres, le 05 octobre 1775 et le 02 février 1777. Le tout pourrait aussi se confirmer par son premier mariage (dont je n’ai pas retrouvé l’acte, mais le registre n’est pas complet) avec une femme qui porte un nom Hollandais qu’on retrouve à Saint-Eustache à la même époque. John serait donc arrivé à Saint-Eustache dès avant 1774.
Le couple John MARTINS de CLARENCIEUX et Sarah Cuvilje SIMMONS aura plusieurs enfants.
1 – Jean Baptiste MARTINS de CLARENCIEUX, né à Saint-Eustache en 1789. Il semble épouser une Emma HANCOCK vers 1825 et ils ont plusieurs enfants. On retrouve Jean Baptiste à Saint-Martin dans la seconde partie des années 1830 co-propriétaire de l’habitation « Anse des pères » ou « Friars Bay ».
- Vers 1826, Alexander Constantine MARTINS de CLARENCIEUX qui épouse une Feliciana MOORE sa cousine. Il meurent tous les deux à Saint-Eustache
- En 1829, Emma Clementina qui décède aussi à Saint-Eustache,
- Rosa Calcida vers 1830, qui épouse à Saint-Eustache en 1844 un Gideon Godet HEYLIGER,
- Jean Baptiste qui nait à Saint-Eustache en 1838, et épouse sa cousine Felicianna Cornellia MARCIAL (née à Saint-Barthelemy en 1837). Ils vivent à Saint-Eustache.
2 – Martin MARTINS de CLARENCIEUX qui nait à Saint-Eustache vers 1791 et épouse à Saint-Barthelemy en 1816, une Charlotte Rebecca LIEBBE née à Boston. Ils auront plusieurs enfants qui naissent à Saint-Barthelemy mais pour lesquels je n’ai pas retrouvé de descendance.


3 – Isabella Rosa Cacilda MARTINS de CLARENCIEUX qui nait en février 1793 à Saint-Eustache qui épouse Antoine MARCIAL le 17 mars 1810. On peut noter qu’Antoine et son frère Joseph sont commerçants à Saint-Barthelemy, et tous deux également originaires de Calhetta sur l’ile de Madère, ils sont donc aussi Portugais. Antoine y est né vers 1784. Le mariage est annoncé dans le journal local

Le couple aura au moins 7 enfants qui naissent tous à Saint-Barthelemy entre 1822 et 1837. Ils semblent ensuite bouger vers Saint-Eustache où Isabelle décède en 1874.
4 – Jacob MARTINS de CLARENCIEUX qui nait à Saint-Eustache en 1794 mais dont je retrouve pas la trace après,
5 – Maria do Montes MARTINS de CLARENCIEUX qui nait à Saint-Barthelemy en 1805 et épouse un John Heyliger HILL et semble vivre à Saint-Eustache. Un des fils du couple, David Campbell HILL décède à Saint-Barthelemy le 25 septembre 1920. Ci dessous l’enregistrement de sa naissance et de son bapteme dans le registre de l’Eglise Lutherienne Suédoise de Gustavia.

6 – Felicianna Antonia MARTINS de CLARENCIEUX qui nait à Saint-Barthelemy en 1806 et épouse un Raapzaat Heyliger MOORE et semble vivre aussi à Saint-Eustache.

Il y a une nombreuse descendance de John MARTINS de CLARENCIEUX, aux Etats-unis, à Aruba, Saint-Eustache, et au Royaume Unis.


Arbre descendance de John MARTINS de CLARENCIEUX sur 1 page
Richard CAVALLARO, un des descendant de John MARTINS de CLARENCIEUX par sa fille Maria do Montes m’a fait passer ces deux photos :
Un portrait en miniature de Sarah Cuvilje SIMMONS

Une broche ayant appartenu à Sarah Cuvilje SIMMONS

Encore une tombe qu’on déménage pour justifier, à posteriori, une décision prise en catimini
Bref, SAINT-PITEÅ priez pour nous !

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