L’habitation, et la famille Briard

Dans les archives de la période suédoise, on trouve quelques mentions d’une habitation dite « la Briarde » ou « Bréard ». Tout porte à croire que cette habitation portait le nom de ses premiers propriétaires, une famille parmi les colons recensés en 1681. Il est difficile de savoir quel était le nom exact de cette famille, car on trouve les deux orthographes. Avons-nous affaire à une famille, ou à deux familles distinctes ?

Ci-dessous, les mentions de cette famille dans les recensements de Saint-Christophe, de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

1671 – Saint-Christophe

BREARD           Jacques

BRIARD             Jean

BRIARD             Marin

1681 – Saint-Barth      

BRIARD             David      1 Femme, 4 garçons, 1 fille

BRIARD             François               

BRIARD             Jacques 1 femme, 2 filles

1682 – Saint-Martin

BRIARD             Marin

BRIARD             fils 1

BRIARD             fils 2

1690 – Saint-Barth

BREARD           Louis

BRIARD             François

BRIARD             David

La dernière personne ayant porté ce patronyme sur notre île, était une certaine Marie Briard, née vers 1675 à Saint-Christophe, épouse de François Vittet, et mère d’au moins sept enfants. Elle doit être la fille de David ou de Jacques qui figurent sur le recensement de notre île en 1681. Cette pauvre femme, violée par les corsaires anglais lors de l’attaque de 1746, L’attaque anglaise de 1746, les faits dans les archives nous a laissé une très grande descendance, tant sur notre île qu’à Saint-Thomas, Porto Rico et ailleurs.

On peut noter que la famille Vittet possédait l’habitation du même nom, qu’elle a donnée à un quartier, et au plus haut sommet de notre île.

Dans le livret suédois « Examen des terres » de mars 1787, qui donne une description détaillée de toutes les habitations de l’île, on trouve, au Quartier du Roy, l’habitation « La Briarde ». Elle appartient à Robert Gréaux, et mesure cinq carrés. Elle est bordée au nord par l’habitation « Lézard », à l’est par l’habitation « Le Logis », au sud par les habitations « Rose » et « Corossol », et à l’ouest par les habitations « Le Platon », « Gentilly » et « Andrieux ». Le sol est bon et plat dans les parties nord et est, le reste est sec et pierreux. La plus grande partie de l’habitation est consacrée à la culture de vivres et de coton (environ 4 balles produites). Il y a deux maisons sur cette propriété, et elle est habitée par treize personnes blanches et un esclave. Il y a douze chèvres, une vache, et deux jeunes bœufs. 

Le recensement de 1787 indique que Robert Gréaux habite avec sa femme, trois garçons de plus de 14 ans, une fille de plus de 14 ans, deux garçons de moins de 14 ans, deux filles de moins de 14 ans, et une esclave de plus de 14 ans.

On ne sait pas qui possède l’habitation à cette époque, et, si Robert Gréaux y habite, il n’en est pas propriétaire, en tout cas, pas complètement.

En effet, « le 5 décembre 1789, devant le notaire Norderling, Louis Gorijet, Goryet, ou peut-être Goujet d’après la signature , fondé du pouvoir général et spécial  des demoiselles Adélaïde Villaire, son épouse, et Rozette Villaire, sa belle-sœur, de l’isle de Bequia donne quittance à Joseph Laplace, habitant, oncle desdites demoiselles Villaire, ci-devant gérant des biens délaissés dans cette île par leur défunte mère Rose Vittet, à savoir, un sixième de l’habitation Vittet, un sixième de l’habitation Bréard / Briard, et un morceau de terre au quartier de Lorient d’environ quatre carrés ».

Cela confirme bien la connexion entre le nom de l’habitation « Briard » et la famille du même nom. En effet, Rose Vittet était la petite-fille de Marie Briard. On ne sait pas à qui appartiennent les cinq autres sixièmes de l’habitation. Est-ce que Robert Gréaux louait l’habitation en 1787 ? En possédait-il des parts ?

Joseph Laplace doit rendre compte à Louis Goryet de la gestion qu’il a eue des biens appartenant aux demoiselles Villaire. Joseph Laplace se retrouve reliquataire d’une somme de…vide… piastres qu’il a payée le jour même. Puis, Joseph Laplace redonne la gestion des trois portions de terre à Louis Goryet pour en faire ce qu’il veut grâce au pouvoir qu’il a reçu des demoiselles Villaire. Il ne parvient pas à louer les terres, et se résout donc à les vendre.

Le 13 décembre 1789, Charles Ventre est adjudicataire d’un sixième de l’habitation nommée Briard au Quartier du Roy. Il achète cette part à la sortie de la messe paroissiale à Louis Gorijet, ou Goryet, procureur des demoiselles Adélaïde et Rozette Villaire, pour la somme de 8 piastres. Le même jour, les demoiselles avaient vendu une portion de l’habitation Vittet située au Grand Cul de Sac à François Berry pour la somme de 108 piastres. François Berry agissait pour le compte de Louis René Laplace.

Je n’ai pas réussi à retrouver les détails, mais l’habitation semble avoir été divisée ensuite ; cela n’est vraiment pas clair du tout. Il apparaît que Monsieur Alex Henri Vallée de Coudré en achète une partie qu’il lègue à deux enfants qu’il a eus de Jane Brozette. On peut noter que Jane est une ancienne esclave, et qu’elle a eu des enfants avec Norderling, et aussi avec Peter Herman Von Rosenstein, gouverneur de notre île.

Jane a vendu une partie de l’habitation à Monsieur Rougon et Madame Jametel, un couple de commerçants, le 26 août 1803.

En juillet 1807, Joseph François Bernier, créditeur du couple Rougon, fait saisir l’habitation.

Et c’est là qu’on trouve une description très complète de cette habitation, qui semble bien plus importante que ce qu’en disait le document de 1787.

L’habitation est située dans le quartier du Roy et consiste en 20 carrés de terre, ou environ, bornée au sud par les terres de Jean Marie Duzant (présentement appartenant à William Bell), à l’ouest par Lucas Meyer, au nord par les terres de Charles Dreyer (actuellement Gustaf Sahlstedt) et à l’est par Madame, veuve Lacarriere (aujourd’hui, Jacques Gréaux). Là encore, il semble qu’il y ait des confusions entre les noms des propriétaires et ceux des occupants des habitations qui bornent.

L’habitation comporte une maison principale construite en charpente, en bois du Nord et en bois blanc, divisée en deux chambres, dont une à chaque extrémité, et une salle au milieu, le tout surélevé sur un solage, mesurant 31 pieds de long sur 16 de large (mesures françaises).

Une autre maison, construite aussi en charpente, élevée également sur un solage en maçonnerie, et mesurant 24 pieds de long, sur 16 de large. Elle est divisée en deux pièces, dont l’une renferme un bac d’eau, qui mesure environ 13 pieds de long, 7 pieds de haut et 6 pieds de large. Au nord de la maison, il y a un bassin en maçonnerie dont le fond est carrelé de briques, servant à recueillir les eaux du bac.

Une autre maison, également construite en charpente de la même taille que la précédente, divisée en 3 chambres et montée sur un solage en maçonnerie formant une cave.

Une cuisine en mur et en charpente, et un four attenant, un poulailler sur le derrière de 24 pieds sur 10.

Une autre petite maison en forme de pavillon, couverte d’essentes du nord, et doublée en essentes blanches, non planchées dans le fond, élevée sur un solage également. Cette maison mesure 16 pieds de long sur 11 de large et est divisée en 2 chambres. Vers le nord de cette maison, il y a un bassin en maçonnerie dont le fond est carrelé de briques, donnant sur un jardin potager non ensemencé.

Deux « cases à nègres », dont une est debout, non palissadée et au tiers couverte de paille, et l’autre, abattue, dont il ne reste que très peu de poteaux, et dont le toit est couvert de paille déjà vieille.

Un colombier vide pouvant loger huit paires de pigeons, six tonnelles dépendantes desdites maisons, un petit jardin, deux clapiers en bois, et neuf pièces à eau de différentes grandeur en bon état.

L’habitation est alors estimée pour 2560 gourdes

Il faut bien comprendre que les maisons en charpente sont encore assez rares à la campagne à cette époque. On l’a déjà dit : la plupart sont encore construites en palissades, et couvertes de paille. Ici, on trouve non pas une, mais quatre maisons en charpente, élevées sur solage, dont trois sont planchées. La plupart des autres cases sont posées à même le sol. De plus, l’habitation compte une cuisine, un four, et, surtout, deux bassins carrelés, en plus de neuf « récipients » pour stocker l’eau. Ce devait donc être une habitation importante, située le long de la route actuelle menant à Colombier. Peut-être au niveau du plat qu’on appelle « l’œuf » de nos jours.

Le 17 février 1818, l’habitation est mise en vente aux enchères. Elle appartenait à la maison de commerce Elbers and Krafft mise en faillite. Il est dit qu’elle s’appelait Habitation Rougon, mais à présent, on la connaît sous le nom d’habitation Mulhein. Bornée au nord par Gustaf Ekerman et François Gréaux père, au sud par Joseph Hart, à l’est par la veuve Lacarrière, et à l’ouest par les enfants de Lucas Mayer père.

Le document ne parle plus que d’une maison divisée en une salle et diverses chambres, cabinets, y compris, ainsi que de deux galeries, l’une du côté ouest, l’autre vers l’est, où se trouve un vestibule. Il y a également une cuisine, des chambres à domestiques, une écurie et une étable contiguës, ainsi qu’une mare.

L’habitation est adjugée à James Prince pour 2 100 gourdes. Il est difficile d’en savoir plus, car il n’existe pas de matrice cadastrale pour la campagne à l’époque suédoise.



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2 réponses

  1. Jérôme, Quel magnifique travail ! Toutes vos recherches méritent un profond respect. Evelyne

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  2. Jérôme, Quel magnifique travail ! Toutes vos recherches méritent un profond respect. Evelyne

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